La deuxième lettre du Secteur Transpersonnel collectif du zodiaque naturel occupe le Milieu du Ciel où s’ouvre la 10ème maison attribuée au signe du Capricorne gouverné par Saturne – le dieu Kronos des Grecs – le dieu du Temps et de la réalité tangible de l’être-au-monde, depuis la naissance jusqu’à la mort.
Image archétypale du Réalisme, avec ses limites et limitations, les symboles de Saturne – le sablier pour le temps qui s’écoule, et la faux qui fauche la vie à un moment donné – nous rappellent à notre condition éphémère de simple mortel. Personne n’ échappe à la mort et c’est probablement la raison pour laquelle Saturne a reçu le surnom de ‘Grand Maléfique’, alors que sans cette conscience de notre finitude nous ne prendrions sans doute ni la détermination ni le plaisir de célébrer chaque moment lumineux de la vie comme un cadeau divin à ne pas gaspiller.
Saturne : Grand Saboteur et Grand Constructeur
Le Saturne des Romains – auquel fut assimilé le dieu Kronos des Grecs – offre une image particulièrement inspirante durant la traversée de cette période saturnienne qui correspond au transit de Pluton en Capricorne (de 2008 à 2023). Une période sombre s’il en est et qui pourrait se résumer au Pouvoir (Pluton) de la Peur (Capricorne/Saturne). S’il y a un aspect maléfique que l’on peut systématiquement attribuer à Saturne dans son rôle de ‘Grand Saboteur’ c’est bien le pouvoir obscur et destructif de la peur. Nous venons d’en faire l’expérience durant ces deux ans et demi de manipulation par le pouvoir (Pluton) qui utilise la peur de la mort (Capricorne gouverné par Saturne) pour imposer sa loi unique.(1)
Mais on sait aussi que ‘Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort’ (Nietzsche) – au propre comme au figuré. Et il est grand temps de récupérer notre pouvoir, de regarder nos peurs en pleine lumière, et de rendre à Saturne son rôle de ‘Grand Constructeur’ en se rappelant qu’il était aussi le souverain de l’âge d’or chanté par Ovide et Virgile comme étant une période bénie par les dieux. Il est vrai qu’en ces temps reculés, les hommes étaient peu nombreux et pouvaient déambuler dans la Nature en toute liberté en cueillant, chassant et partageant juste ce dont ils avaient besoin pour vivre. (2)
Les derniers chasseurs cueilleurs sont très, très loin de la société de consommation, d’abondance et de gaspillage effréné qui a envahi une partie de la planète plus que jamais durant ces quelque 50 dernières années, et de manière tellement exponentielle qu’elle met en danger la survie même de la Nature et de ses habitants. Il n’est pas possible de retourner à cette période idyllique des chasseurs cueilleurs avec 8 milliards d’habitants sur Terre.
Mais les mythes de Saturne, Lord du Karma, l’image archétypale des limites et des limitations, de l’authenticité, de la simplicité et de la prudence aussi, devraient inspirer à revoir nos responsabilités personnelles et collectives pour éviter le haut prix à payer par l’accumulation effrénée d’un legs karmique par trop négatif.
‘Moins c’est plus’ reste une devise de Saturne dans son rôle de Grand Constructeur d’un éventuel ‘Nouvel âge d’or’.
Saturne face au Monde
Les planètes Jupiter et Saturne représentent, chacune à leur manière complémentaire, les deux planètes sociales qui symbolisent
le rapport entre notre monde intime (décrit par les cinq ‘planètes’ rapides et l’Ascendant ) et le monde générationnel au sens large que nous devons intégrer (décrit par les poids lourds que sont Uranus, Neptune et Pluton dont l’orbite varie entre 84, 165 et 248 ans respectivement).
Jupiter met 12 ans pour accomplir son tour, et l’orbite de Saturne est d’environ 29 ans et 1/2. Dans la hiérarchie des planètes astrologiques, Jupiter et Saturne sont les deux planètes sociales qui font office de pont reliant l’individu à la société dans laquelle il va devoir s’insérer au cours de sa vie.
Si Jupiter symbolise le pied sur l’accélérateur et la confiance en l’avenir, Saturne symbolise plutôt le pied sur le frein avec un certain conservatisme et la peur de l’avenir. Un équilibre entre l’enthousiasme fougueux de Jupiter et la prudence terre à terre de Saturne peut rendre le Voyage particulièrement plaisant et constructif.
En tant que marqueur temporel, il est utile de comprendre pourquoi les Anciens ont défini Saturne-Kronos comme étant le dieu du Temps ainsi que des limites et limitations. Dès le début de l’astronomie, c’est en se basant sur le cycle zodiacal de Saturne, dernière planète visible à l’œil nu, que l’on pouvait divisé la vie en chapitres d’environ 30 ans.
Les retours de Saturne à son point de départ, le degré zodiacal de Saturne à la naissance, se répètent en effet tous les 29 1/2 ans. Ils marquent des étapes importantes dans l’évolution individuelle.
Le passage de la période d’apprentissage et de formation du premier chapitre de la vie, vers la deuxième période de maturité et de production a lieu au 1er retour de Saturne vers 29-30 ans.
Après cette période de réalisations et de pleine participation au monde adulte, le deuxième retour de Saturne vers 58-59 ans ouvre les portes au 3ème chapitre de la vie, la période du ‘troisième âge’ où devrait commencer un éventuel retrait du monde productif permettant des choix personnels libres des contraintes et autres obligations sociétales et matérielles.
Ce troisième chapitre s’étend jusqu’au troisième retour de Saturne qui a lieu vers 87 ans et signe l’entrée dans la vieillesse dont l’appréciation et la longévité dépendront de l’état de santé physique et mentale individuel.
A ce jour, on peut compter une vingtaine de personnes recensées dans le monde qui ont fait l’expérience rarissime d’un 4ème retour de Saturne en vivant au delà de 116 ans !
Saturne, en tant que Rex Mundi – roi du monde – nous guide à chaque étape de la vie et impose le défi de vivre en respectant les règlements imposés de l’extérieur tout en restant fidèle à notre loi intérieure.
La culpabilité est un sentiment saturnien qui envahi l’individu qui peine à trouver un équilibre entre les règles imposées par la société et la fidélité aux principes dictés par sa conscience individuelle. Nous avons récemment assisté au conflit débilitant pour les individus – comme pour la société, d’un usage intempestif de la culpabilisation saturnienne pour imposer un règlement arbitraire collectif.
La philosophie reste le meilleur outil de Saturne pour faire face au vaste monde et développer cette sagesse qui permet de vivre avec les limites et limitations de la vie, et le pessimisme qui l’accompagne éventuellement. Cette Sagesse s’acquiert avec l’âge et l’expérience. Elle rend la vie à la fois plus dense mais aussi plus légère.
L’idée de finitude incite à prendre ses responsabilités pour vivre au plus près de ce destin unique qui nous est adjugé.
‘Connais-toi toi-même’ est la recommandation inscrite sur le temple de la pythie d’Apollon à Delphes. L’invention des dieux et des déesses qui sont devenus les images archétypales de l’astrologie humaniste peut nourrir cette recherche individuelle. Être authentique, faire l’effort de comprendre les paradoxes qui nous habitent, tout cela prend du temps et une certaine discipline. Saturne nous accompagne jusqu’au bout de ce temps qui nous est imparti en indiquant éventuellement les balises à suivre.
Astrologie Lunaire – Principe n°10 Authenticité, Discipline, Mélancolie
Saturne est l’image archétypale de l’Autorité avec ses règles et ses obligations à suivre pour le vivre ensemble. Mais autant Saturne réclame le respect des règles extérieures, autant il est intransigeant sur la fidélité à nos lois intérieures. Vivre et agir dans l’authenticité, en accord avec soi-même, est un besoin inhérent au bonheur de vivre mais qui n’est pas toujours possible selon la société, la culture et la période où nous vivons. Le manque de conscientisation en est aussi une entrave évidente.
Saturne peut aussi signifier le tyran intérieur tout autant que le dictateur extérieur – la plupart du temps motivés par un pessimisme latent.
Apprendre à se connaître pour accepter – sans peur et sans reproche, les limites et limitations qui nous sont propres, et qui sont propres à la vie, est une gageure saturnienne. L’image de l’ermite qui sied si bien à Saturne est là pour rappeler que la solitude est une nécessité pour faire le point et se recentrer sur qui l’on est vraiment, et sur ce qu’est la vie.
La position et les éventuels aspects entre Saturne et les planètes personnelles ou l’ascendant sont autant de révélateurs inspirants à vivre selon nos possibilités et besoins intrinsèques. Il faudra aussi y ajouter l’aide d’Uranus, Neptune et Pluton pour sortir de l’attitude conformiste et matérialiste liée à l’image archétypale de Saturne, le Senex ou vieux Sage bien intentionné.
Prendre le temps de définir une discipline personnelle que ce soit au niveau physique (corps) au niveau intellectuel (esprit) ou au niveau spirituel (âme) semble indispensable pour vivre en accord avec soi-même et avec le monde, sans se laisser aller au pessimisme et au négativisme ambiant. Apprendre à changer d’attitude lorsqu’il est impossible de changer la situation fait aussi partie de cette discipline.
Il est évident que relever ces défis personnels et sociaux n’est pas une mince affaire et que l’on peut sombrer dans la déprime lorsque on entend cette petite voix typiquement saturnienne qui susurre ses ‘tu devrais, tu aurais dû, tu n’aurais pas dû, ah ! si seulement tu avais…’ tout en nous rappelant à notre piètre condition de mortel.
Des pages et des pages ont été écrites depuis des siècles sur le caractère saturnien de la mélancolie. (4) Mot ambivalent s’il en est, et qui est devenu relativement désuet et romantique avec le temps pour être remplacé par le terme plus médical de dépression – accompagnée de plus en plus souvent de médicaments ad hoc censés la faire disparaître.
Mais le message de Saturne, lui, ne disparaît pas. Heureusement d’ailleurs car ‘Saturne est l’astre sublime de la méditation,… et de la contemplation créatrice qui a son siège dans l’esprit (mens) et nulle part ailleurs’. Il est évident que si l’on se met à réfléchir au monde présent, que ce soit aujourd’hui ou il y a 1000 ans, l’image archétypale de Saturne ‘engendre la mélancolie ; mais en temps qu’ami et protecteur d’une existence supérieure et purement intellectuelle, il peut aussi la guérir’. (5)
Saturne invite à descendre dans les profondeurs philosophiques de la vie afin de développer cette sagesse qui vient avec l’expérience, les angoisses existentielles et la réflexion. Saturne ne permet pas de tricher avec la vie, ni avec nous-même, ni avec les autres.
Météo astrologique de la Pleine Lune en Capricorne
En ce premier mois d’été c’est Saturne, une divinité de l’hiver qui gouverne la Pleine Lune à 21°21′ du Capricorne opposé au Soleil en Cancer sur l’Axe des Structures mariant le Passé et le Présent des deux éléments Eau et Terre du Cancer et du Capricorne. Un moment qui inspire à se rappeler du passé pour mieux construire le présent.
Saturne en Verseau forme un semi-sextile (30°) à la conjonction Lune Pluton et un quinconce (150°) au Soleil. Pas mal de sérieux ajustements et autres transformations à faire au niveau structurel de la société tout autant qu’au niveau individuel.
Saturne appartient à l’élément Terre qui se décline au présent et appelle donc aux transformations profondes nécessaires ici et maintenant.
Heureusement que s’ajoute une petite note légère, papillonnante et futée dans le trigone de Saturne à Vénus en Gémeaux. Il n’est donc pas interdit de sourire et même de s’amuser chemin faisant, au contraire, cela pourrait faciliter la tâche.
Neptune sextile à la Lune et trigone au Soleil invite à débrider notre imagination, à laisser une plus grande place à l’amour et à la compassion tout en laissant place à l’inspiration divine qui peut faire des miracles. L’espoir fait vivre et il n’est pas interdit de rêver. S’évader de la réalité semble aussi un cadeau neptunien en ces mois de grandes vacances.
Et juste au cas où, la petite ritournelle neptunienne Rien n’est parfait mais c’est parfait peut nous ramener gentiment sur Terre.
Avec Uranus trigone à la Lune et sextile au Soleil, on peut s’attendre à… l’inattendu. Surprise, surprises ! L’inventivité est aussi bienvenue pour trouver des solutions aux problèmes actuels. Ajouter une certaine dose de détachement uranien fait aussi partie du bonheur de vivre.
Notes
Photo : ‘Light from the Dark’ in Klaus Kapelle de Peter Zumthor à D-Mechernich, photo CGC 2013
(1) Lire dans ‘Écriture Céleste…’ p.397 le chapitre sur ‘Saturne : le grand saboteur et le grand constructeur’
(2) Pour une description des quelques derniers ‘Chasseurs Cueilleurs’ survivants sur la planète, le livre de l’anthropologue James Suzman ‘Affluence without Abundance – The disapearing world of the Bushmen’ (Bloomsbury, USA 2017, pas de traduction française à ce jour) décrit la vie d’un peuple qui a ‘bien vécu sans abondance’ depuis 200.000 ans en accord avec la Nature hostile du Kalahari. Sans chefs et sans argent !
(3) Suivant la Liste vérifiée des personnes les plus âgées au monde (Wikipédia)
(4) ‘Saturne et la Mélancolie’, R. Klibansky, E. Panofsky et F. Saxl, grand classique (738 p.) paru en 1964 ‘devenu presque légendaire’ sur un sujet qui a occupé l’esprit humain depuis l’Antiquité et qui continue d’envahir nos vies au XXIè siècle…
Paru en français chez Gallimard – NRF dans la Bibliothèque illustrée des Histoires (1989)
(5) id. Voir p.427